L'intérêt du monde scientifique pour le mécanisme de la submersion et la préoccupation de l'autorité publique pour le secours aux noyés ne sont pas chose récente. La noyade a depuis fort longtemps suscité des d'interrogations, fait l'objet de recherches, généré des systèmes de réanimation plus ou moins farfelus, voir dangereux, et même inspiré la rédaction de textes de prévention.
Déjà sous le règne de Louis XIV, la prévention des risques liées à la noyade des enfants était une inquiétude de l'administration. Une ordonnance royale du 18/11/1701 obligeait les particuliers à faire entourer les puits et les bassins d'une margelle (Pierre ou assise de pierres qui forme le rebord d'un puits, d'une fontaine ou d'un bassin) de sécurité.
Pendant très longtemps, les professeurs d'anatomie et les médecins pensaient que le décès par la noyade était provoqué par l'absorption d'une trop grosse quantité d'eau. A cette époque, la plus grande confusion régnait dans le monde médical. Du XVIIIème siècle à la première moitié du XIXème siècle, on ne savait pas différencier les diverses formes d'asphyxie (strangulation, pendaison, gaz toxique et bien évidemment la submersion). C'est pour cela, que jusqu'à la première partie du XVIIIème siècle, la première action à entreprendre sur un noyé était de lui faire recracher l'eau qu'il avait pu avaler. Le malheureux était alors suspendu par les pieds ou roulé dans un tonneau. Si l'eau ne l'avait pas encore tué, le traitement infligé finissait le travail.
De très nombreuses techniques furent mises au point jusqu'à la fin du XIXème siècle par les scientifiques de l'époque comme François-Emmanuel Fodéré (médecin et botaniste français - 1764-1835) ; Antoine Portal (professeur d'anatomie au collège de France et au jardin du Roi - 1742-1832) ; Philippe-Nicolas Pia (apothicaire et échevin de Paris, pionnier du secourisme en faveur des noyés - 1721-1799) et bien d'autres. Il n'est pas possible de citer toutes les méthodes mais nous retiendrons à titre d'exemple celle décrite par Fodéré. Selon lui « l'idéal serait de déshabiller le noyé, de le sécher et de déposer son corps dans un lit modérément chaud. Il faut ensuite que la tête soit placée sur un coussin un peu dur, il convient alors de garnir les creux des aisselles, des aines et des parties sexuelles de pièces de laines chaudes, de même que les pieds ». Fodéré écrivit également que pour venir en aide aux noyés, la machine fumigatoire de Pia pouvait être une aide utile aux secours.
Cette machine imaginée par Philippe-Nicolas Pia fut disposée le long de la seine dans des boites-entrepôts contenant le mode d'emploi et tout le matériel nécessaire pour secourir les noyés. Son fonctionnement était basé sur l'excitation du système nerveux. Les sauveteurs devaient déshabiller le noyé, l'essuyer avec de la flanelle, le couvrir d'un bonnet puis faire entrer de l'air dans les poumons en soufflant dans la bouche par le moyen d'une canule, et enfin introduire dans les intestins de la fumée de tabac par le fondement, en se servant de la machine umigatoire, tout en chatouillant le dedans du nez et de la gorge avec une plume et en frottant la surface du corps avec une flanelle imbibée d'eau-de-vie.
http://reanim.free.fr/procedes/p_fumigation/p_fumigation.html
La mort par submersion intrigue le monde scientifique qui va continuer inlassablement à étudier et tenter de comprendre ce phénomène. En France, un médecin Antoine Louis démontra que c'est l'introduction de l'eau dans les poumons par les mouvements respiratoires qui entraîne le décès de la victime. Il préconisait déjà l'insufflation par le bouche à bouche comme moyen efficace de réanimation.
Il fallut attendre les années 1880 pour que le processus de l'asphyxie par submersion puisse enfin être expliqué clairement. On doit cette avancée médicale aux expériences menées sur des chiens que l'on plongeaient dans l'eau pour étudier leurs comportements au cours de la noyade. La société médico-chirurgicale de Londres, Paul Bert, Paul Brouardel, Paul Loye et d'autres vont tour à tour ou par des travaux communs, faire avancer la compréhension du mécanisme de la noyade, identifier les différentes phases de la noyade et décrire les signes extérieurs et internes de la noyade.
Mais dès le début de XXème siècle, les médecins légistes et experts perçoivent la grande difficulté d'interprétation de tous ces signes pour établir un diagnostic fiable de la submersion vraie. Les recherches vont alors se poursuivre pour identifier d'autres phénomènes physiologiques permettant d'apporter des preuves concrètes supplémentaires d'identification de la noyade. Dans les années 1910, seul la présence d'un volumineux champignon de mousse présent dans les voies aériennes attestait avec une quasi certitude de la mort par submersion.
Mots Clés : Submersion ; Noyade ; Réanimation ; PIA ; Fumigation